Le Maître du Mont Xîn by Gérard Adam

Le Maître du Mont Xîn by Gérard Adam

Auteur:Gérard Adam [Adam, Gérard]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: M.E.O.
Publié: 2022-08-14T22:00:00+00:00


– Et à supposer… Quel homme prendrait une épouse qui s’est accouplée à des dizaines d’autres, sans parler des femmes ?

– Un homme qui n’y attacherait aucune importance. Jade est morte. Juste maintenant. Vous l’aviez vue, elle vous avait vue, elle fantasmait que nous… Je considère ça comme une complicité. comme… disons… le passage du témoin.

V

1

Aux deux tiers de la crevasse, la pente se fait raide. Elles s’asseyent pour souffler côte à côte. Le brouillard est si dense que la roche suinte. Elles sortent de leur paquetage un châle dont elles s’enveloppent, mangent une crêpe, boivent un gobelet de thé.

– Mâa… L’étranger… Il parle de l’amour, mais pas de cet amour qui nous est interdit. Les humains doivent s’aimer les uns les autres, et surtout aimer un Prince invisible appelé Dieu, qui a son palais dans le ciel, qui a fabriqué tout ce qu’on voit et même ce qu’on ne voit pas. Il prétend aussi qu’après la mort existe une autre vie. Heureuse pour ceux qui auront aimé ce Dieu et fait du bien, malheureuse pour les autres. À Bâ-tan, on le prend pour un fou. Les autorités l’ont arrêté, mais comme il ne critique pas le régime et qu’il prône l’obéissance, on l’a relâché. J’ai une amie d’enfance parmi les converses. Elle était moniale, elle est tombée enceinte. Mais son bébé est mort. Elle pleurait jour et nuit. Elle a rencontré cet homme qu’elle appelle « mon père », alors qu’il n’a ni femme ni enfant. Il lui affirme que des êtres merveilleux, munis d’ailes, tout de lumière, ont pris son bébé pour le porter à Dieu. Quand elle quittera ce qu’il appelle notre vallée de larmes, elle le retrouvera. Ils seront heureux ensemble pour l’éternité, ce qui veut dire toujours, toujours, sans fin. C’est beau, mais difficile à croire ! En tout cas, ça fait beaucoup de bien à mon amie. « Là-bas », tu as rencontré des hommes pareils ?

– Ils sont nombreux. Des peuples entiers ont foi en leurs paroles. Ce qui ne rend ces peuples ni meilleurs ni moins hypocrites que celui de Bâ-tan.

– Mais ces prêtres eux-mêmes, vivent-ils dans cet amour ?

– Quelques-uns.

– Pourquoi les autres continuent-ils de le prêcher ?

– Pourquoi restes-tu moniale du Mont Xîn si tu rêves de partir « là-bas » ?

Elle devine que Singhâ baisse la tête.

– Un tel idéal exige un travail permanent sur soi, pénible, fastidieux. Il est plus facile de se persuader qu’on vit dans l’amour de Dieu et de ses semblables parce qu’on se conforme aux rites, qu’on fait l’aumône, que sa conduite n’offre pas de prise au scandale. Certains ne s’interrogent plus et l’inertie les enlise dans la boue familière. D’autres se savent indignes, mais pensent que la parole peut se passer d’exemple. Certains enfin ont cessé d’y croire, mais jouissent de l’aura que leur état procure. En vérité, si on ne pratique pas ce que l’on prêche, mieux vaudrait s’arracher la langue ! Mais si on le pratique, ce sont les autres qui risquent de vous l’arracher !…

Soyindâ pense au Révérend Simon, au père Javez, perpétuellement tiraillé



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